lundi 30 mars 2015

Chapitre 3


Nous devrions tous commencer nos rencontres par embrasser l'autre.
Me semble que ça serait plus simple comme ça.
Découvrir sa bouche délicatement, en faire le tour avec sa langue, apprivoiser les saveurs. Voir si harmonieusement nos salives se plaisent. Ensuite on parlera dans un échange teinté de ce contact intime.

Création instantanée de liens. Speed fusion.

Dans son oreille, c'est ce que je lui chuchote.


Le couple à côté de nous et qui en sont aussi à leur première rencontre devrait vraiment s'embrasser. Ils verraient tout de suite si ça fitte…ouais, j'aurais dû t'embrasser dès mon arrivée finalement.


On rit beaucoup.


Ses lèvres sont définitivement confortables, pulpeuses, avenantes.
Il sent bon la vanille et le bois. Discrète odeur mais qui restera longtemps sur moi.
Il me sent beaucoup aussi, des mains qui frôlent mon visage, la nuque, qui écartent mes cheveux qui me tombent devant les yeux. Doux.

On recommande à boire.

Une Dom juan pour lui…juste pour être concept.

On rit.

Nous sommes seuls, au milieu de tous. Comme tous les gens qui se découvrent pour la première fois. Le ton change, la discussion s'installe entrecoupée d'exploration du visage de l'autre.
Je lui dis que je n'aime pas les jeunes, enfin, en général, et que mes fantasmes sont peuplés d'homme murs et grisonnants. Je n'ai pas cette envie d'initiatrice, de montreuse de choses, de maitresse d'école. Zéro ma zone de confort habituelle. Il sera mon premier jeune (et de loin) et mon premier français aussi. Il hésite entre se sentir flatté ou intimidé par cette responsabilité de porter la réputation de son peuple au lit. Il rigole naturellement car il ne semble intimidé par rien.


J'ai payé, en bonne féline que je suis.

Il a ri.


Nous avons ensuite changé de terrain de jeux et sommes allés manger question de traumatiser un peu les serveurs vietnamiens si pudiques de nature. 

Il a payé, en bon mâle qu'il est.

J'ai ri.


Sur le trottoir, il est plus grand que moi.
Je ne vois rien de son corps. Ses mains sont discrètes même si sa bouche se fait insistante.

-Qu'est-ce qu'on fait?
-Je te ramène chez toi et on avisera.


Je le ramène, on s'embrasse aux feux rouges. J'hésite entre trouver cela vraiment chouette ou vaguement ridicule. Un conducteur nous klaxonne gentiment comme pour un mariage. J'hésite à l'amener sur le Mont-Royal pour faire du necking dans le char comme je faisais à 15 ans. Ce serait très montréalais comme expérience et j'ai l'âme d'une guide touristique mais je trouve vraiment que j'ai passé l'âge.

Il y a un âge ?

Tu ne me croiras pas, je le sais, mais tu es belle

Je ris. Non, je ne te crois pas, je ne crois plus personne de toute manière, mais c'est gentil.

-Tu veux monter?

Est-ce que je veux monter? Oui, naturellement. Mais je sais aussi ce que je risque de ressentir après. Je me connais trop et je me sais fragile aussi.

-Hum, honnêtement, je vais monter si tu as envie de clore l'affaire ce soir car j'aime terminer des chapitres. Mais, personnellement j'aime mieux attendre une autre fois. C'est plus moi d'attendre un peu. J'aime construire le désir et les one night du genre rencontre-baise-départ en quelques heures, je ne sais pas trop comment faire.

Ceci dit, j'ai envie de faire l'amour avec toi et déjà merci pour ça.

-On se revoit, qu'il me dit alors…ça me va aussi d'attendre.

Je suis une expérience pour lui.
Il en est une pour moi.
Il m'oblige à jouer avec l'élastique de ma morale.
À modifier mes schèmes de relations. À ne pas avoir d'attentes et à me jeter dans le vide.
C'est un peu comme partir en voyage. Attrait de la découverte, peur de l'inconnu, un certain lâcher prise sur les évènements, ne pas savoir de quoi sera fait demain, gouter autre chose.
L'espace de quelques heures.
Il est mon voyage et je suis le sien.

2 commentaires:

  1. Très beau texte, belle histoire, à suivre <3
    Bienvenue dans le monde des séductrices ;)

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  2. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

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