mercredi 22 février 2017

Caroline

« Tu viens me rejoindre? »

Il était aux danseuses avec deux amis.

Soirée de gars avec le frère de l’un qui reste dans l’ouest.
Les danseuses, parait que juste au Québec que ça se donne pour la peine.
Passage donc obligé d'un intermède au pays.
Entre le souper chez la grand-mère et la poutine du coin.

L’autre ami, c’est son meilleur ami.
Au géant.
Celui avec qui, un jour, on va finir par coucher.
Je le sais.
Que c’est juste une question de temps avant que ça se fasse.

J’ai hésité.

Je revenais de la piscine, il était tard, je n’étais pas maquillée.
Des détails de même.

Il a insisté.

Et puis, basta…des fois l’occasion est là.
Me suis remaquillée rapidement, j'ai ramassé mes cheveux mouillés en une queue de cheval, j'ai mis des bottes noires à talons et un chandail noir sur des collants noirs.

Suis allée le rejoindre.

Ne serait-ce que pour ramener les gars s’ils avaient trop bu.
Suis fine comme ça!

(…)

Du monde pour un mardi soir.
Enfin, il me semble.

Les gars contents de me voir.
Un peu réchauffés aussi.
Pas mal même.

Ils avaient soupé là.

Puis, son meilleur ami avait déjà « spotté » sa danseuse préférée.

Qu’il s’est empressé de me désigner.

Celle assise avec une camisole turquoise.
Toute petite de partout.
Un corps d’enfant presque sur un visage qui en avait vu d’autres.
Une des plus âgées de l’endroit…by the way, son ami aussi aime bien les vieilles.

Elle est venue s’assoir avec nous et on s’est mise à jaser.

Caroline.

Son vrai nom qu’elle me dit. 


Au début, elle s’était choisie un nom de danseuse, Clara.
Puis elle a trouvé que ce n’était pas elle. 
Elle, elle était Caroline et authentique dans tout ce qu’elle faisait.

Vocation tardive, parait que ça fait juste trois semaines qu’elle danse.

On a jasé de ça.

La danse, le rapport aux clients, l’expérience, qu’elle avait un amoureux qui trouvait ça étrange qu’elle danse mais que ça excitait full.

Tiens, l’excitation de partager sa blonde. 

Plus courant qu’on ne l’imagine.


Elle me disait qu’elle ne cadrait pas trop dans la place parce qu’elle parlait trop bien.
« T’es pas vulgaire dans ton langage » lui disait souvent les gars…elle ne pensait pas que c’était un compliment.

Très ésotérique, enfin il m'a semblé, la Caroline.
Elle parlait bien pour vrai.
Vive aussi.

En cheminement vers des rencontres authentiques dans une approche de pleine conscience.
Pas trop certaine de ce que ça voulait dire dans un cadre d’un travail de danseuse mais c’était intéressant.

Ses yeux pétillaient pour vrai et son sourire lui mangeait tout son minuscule visage.
Elle trouvait que je dégageais une belle féminité.
M'a demandé si j'aimais les femmes.

Elle s’est levée, est partie un temps avec l’ami (parait qu'ils jasaient alimentation bio dans la cabine), est revenue, est repartie jaser avec d’autres gars à d'autres tables, est allée danser sur la scène.

Elle est revenue me voir ensuite pour me dire dans l’oreille que si j’avais envie d’aller en arrière avec elle, que je lui fasse signe.

Pas pressée du tout, on a continué à boire de la bière en regardant la crowd.

Puis.

On s’est décidé à se lever.

« On amène l’ami avec nous? » que j’ai demandé au géant.

On s’est levé les trois.

J’ai demandé à Caroline si ça rentrait dans sa zone de confort.
"Oui mais merci de demander"...qu’elle m’a répondu

On s’est entassé dans la minuscule cabine.

Me suis assise sur les genoux du géant.

Le temps de deux danses, je pense que je suis celle qui s’est le plus fait toucher.

Le géant, habile, avait dégrafé mon soutien gorge et me flattaient les seins.
L’ami aussi... a glissé sa main sous mon chandail.
Trop occupé à jaser et flatter Caroline, m’en suis pas vraiment rendue compte.
Des mains de l’ami.
Ça m’a fait sourire quand j’ai remarqué.

Minuscule la cabine.

Presque trop de mains et trop peu de peau nue de libre.

Il aurait fallu un corps de baleine pour pouvoir s’épivarder à l’aise.
Et se remplir de chair.

Enfin, c’était…intéressant, dense, flou aussi.
Trop de stimulation en condensé.


Moi qui aime bien le slow sexe, c’était comme boire des shooters les uns après les autres.
Rapidement avalés.
Trop.

Et.

En sortant de la cabine Caroline qui me dit qu’elle veut me parler.

Qu’elle et sa copine (qui danse aussi mais qui donne également des cours de yoga et de je ne sais pas trop quoi de zen) organisent régulièrement des soirées « sexy conscious », qu’elle pense que ce serait mon genre et qu’elle me donne ses coordonnées si jamais ça m’intéresse.

J’ai souri.

De repartir avec le numéro de la danseuse dans mes poches.

(…)

 « On propose à l’ami de venir dormir avec nous? » de demander le géant.

« Non. Il est trop saoul, il va dire oui mais il n’est pas en état pour le faire en toute conscience.  Ce ne serait pas correct et j'ai pas trop envie qu'il le regrette demain matin.»

La notion de consentement ça marche dans tous les sens et de toute évidence, l’ami était trop chaud pour décider ce qu'il avait vraiment envie.
Je ne pense même pas qu'il va se souvenir demain qu'il m'a touché les seins.

L’ami est donc retourné avec son frère qui avait arrêté de boire depuis un bout.

J’ai ramené le géant.

Il était près de deux heures du matin quand on s’est jeté sur le lit.
En total état de frénésie.
Zéro slow sexe, zéro tendre.

Un taureau en rut qui après m’avoir prise dans tous les sens, m’a léché avec persistance.
A++ pour l'effort, mon orgasme fut long à venir.

Quand j’ai jouit dans sa bouche, il s’est écroulé illico, en sueur, à mes côtés.

Endormi raide.

Faut croire que c’est fatigant, les danseuses. ;)

(...)

Tout ceci vécu.
J’ai l’impression que ça va.

Que j’ai fait le tour.
Enfin le tour qui me convient.

Je ne voudrais pas recommencer des expériences et qu’elles deviennent l’habitude, l’ordinaire, le déjà vu.

Je ne veux pas être blasée et perdre cette naïveté qui m’habite encore.
Ce regard de curiosité relative.

Je ne voudrais pas en faire de la consommation.
Surtout.

Que cela devienne une zone de confort.

J’ai vu.
Peu sans doute.
Dans cette brève incursion d'un monde à part.
Avec ses codes à lui, ses repères.

Mais.

C'est bien assez pour moi.

Plus que ça, je vais être mal à l'aise.
Je le sais.

Merci les filles.
Les danseuses ne seront plus des anonymes sans visage.
Car elles porteront, dorénavant, pour moi, le vôtre.

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